AU ROYAUME-UNI, UN SCANDALE DE PARIS TRUQUéS PLOMBE LA CAMPAGNE DES CONSERVATEURS

À moins d’une semaine des élections générales britanniques, fixées au 4 juillet, une affaire de paris électoraux secoue les troupes du camp Sunak. De quoi parle ce scandale ? Qui est impliqué ? Quelles répercussions sur la campagne électorale ? Retour sur une enquête visant jusqu'à 15 candidats et responsables conservateurs.

Un énième coup porté à la campagne électorale des conservateurs achève d’enterrer le parti dans les sondages. Après son discours détrempé et son départ prématuré des commémorations du D-Day, Rishi Sunak est à nouveau sous le feu des critiques.

Pour cause, plusieurs membres de son entourage sont accusés d’avoir illégalement tiré profit de leur proximité avec le Premier ministre britannique pour parier sur le calendrier des élections générales britanniques avant que celles-ci ne soient annoncées. Au total, jusqu'à 15 candidats et responsables conservateurs ainsi que sept agents de la police métropolitaine seraient dans le viseur d'une enquête menée par l’organisme britannique de surveillance des jeux de hasard.

De quoi parle ce scandale ?

C’est un article du Guardian qui met le feu aux poudres. Le quotidien britannique y indique que Craig Williams, député conservateur depuis 2019 et secrétaire parlementaire de Rishi Sunak, fait l'objet d'une enquête pour avoir parié 100 livres, soit 118 euros, sur des élections en juillet trois jours avant que le Premier ministre ne surprenne le pays en annonçant la date. Une « énorme erreur de jugement » pour laquelle il s’est excusé –  sans toutefois confirmer s’il disposait bien d’informations privilégiées au moment de parier –, et qui lui a valu une enquête de la Commission des jeux de hasard. Car si les paris en tout genre sont autorisés au Royaume-Uni, utiliser des informations confidentielles pour en tirer un avantage personnel lors d’un pari constitue une entorse à la loi.

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Une annonce qui n’a pas tardé à faire réagir le Parti travailliste, qui a qualifié ces allégations de « tout à fait extraordinaires » et appelé les électeurs à ne pas donner un mandat supplémentaire aux conservateurs. D’autant que Craig Williams n’est apparemment pas le seul à avoir tenté ce pari risqué : après les révélations du Guardian, plusieurs membres du cercle proche de Rishi Sunak ont été intégrés à l’enquête sur les paris frauduleux.

Jusqu’à 15 candidats et responsables conservateurs seraient soupçonnés, dont Tony Lee, directeur de campagne du Parti conservateur et son épouse, Laura Saunders, candidate conservatrice dans Bristol North West, ainsi que Nick Mason, responsable des données du parti. Ce jeudi, la police métropolitaine a déclaré qu’au moins sept policiers font désormais également l'objet de cette enquête, dont un chargé de la protection rapprochée du Premier ministre.

Comment réagit Rishi Sunak ?

Après deux semaines sans sanctions, Rishi Sunak a finalement annoncé mardi 25 juin retirer son soutien à deux de ses candidats aux législatives soupçonnés, dans une ultime tentative de tirer un trait sur ce scandale qui empoisonne sa campagne électorale. « En conséquence de l’enquête interne en cours, nous avons conclu que nous ne pouvons plus soutenir Craig Williams et Laura Saunders comme candidats », a indiqué un porte-parole de son parti.

En revanche, le Premier ministre a refusé de dire s’il avait informé à l'avance Craig Williams de sa décision d'organiser les élections générales en juillet, afin d’éviter que « des enquêtes indépendantes soient compromises », argue-t-il. Le chef de gouvernement a également déclaré que le parti mènerait sa propre enquête interne, mais qu’il n’était pour l’instant « au courant » d’aucun candidat conservateur ou responsable de parti faisant l’objet d’une enquête au-delà de ceux déjà connus.

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Quelles conséquences sur la campagne électorale ?

Ses tentatives ne semblent cependant pas suffire à restaurer l’image des conservateurs après quatorze années passées à Downing Street, entachées par un bilan difficile à défendre, l’éviction de Boris Johnson et le mandat éclair de Liz Truss. Le laxisme de Rishi Sunak est pointé du doigt jusque dans son propre camp : tandis que James Cracknell, candidat conservateur à Colchester, fustige un « abus de confiance impardonnable », Michael Gove, ministre britannique du Logement, compare cette affaire à celle du « Partygate », scandale dans lequel des assistants de l’ancien Premier ministre Boris Johnson ont été vus transportant des valises de vin dans Downing Street au plus fort du confinement.

Des critiques auxquelles s’adonne aussi le Parti travailliste, qui réclame davantage de transparence sur le nombre de concernés. Pat McFadden, coordinateur national de la campagne travailliste, a notamment exhorté la Commission des jeux de hasard à rendre « publics les noms des autres personnalités sur lesquelles [ils enquêtent] ».

Par ailleurs, lors du dernier débat en tête-à-tête avant l’élection, le leader travailliste Keir Starmer n’a pas lésiné sur les attaques envers son adversaire. Pour lui, parier sur l'avenir du pays démontre le « mauvais instinct » des conservateurs, une attitude semblable à la désinvolture affichée envers les règles du Covid. « Je pense qu'au cours des 14 dernières années, la politique est devenue trop axée sur l'auto-droit et les députés réfléchissent à ce qu'ils pourraient obtenir pour eux-mêmes », a-t-il déclaré. Un reproche doublé d’efficacité depuis que les travaillistes ont été contraints, eux aussi, de suspendre l'un de leurs candidats ayant parié qu’il ne remporterait pas le siège qu’il briguait. « Mes candidats savent que je suis très exigeant. Ils ont vu les conséquences de mes actions », s’est-il félicité, opposant sa réaction à celle du Premier ministre.

Alors que le Parti conservateur accuse déjà un retard d’environ 20 points sur le Parti travailliste dans les sondages d’intentions de vote, l’affaire semble aussi susciter une répulsion chez les électeurs : d’après un sondage Yougov publié mardi 25 juin, près de deux tiers des sondés ont déclaré que Rishi Sunak gérait « assez mal » ou « très mal » le scandale des paris frauduleux.

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